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Musée Félicien Rops - Province de NamurMusée Félicien Rops - Province de Namur
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Focus #27 - Félicien Rops et les arts du Japon

S’il est un pays qui n’a cessé de fasciner les artistes et les foules depuis le 19e siècle, c’est bien le Japon. Fermé à l’Occident vers 1638, le pays du Soleil Levant est contraint d’ouvrir ses frontières sous la pression américaine en 1853 et de signer plusieurs traités commerciaux avec la France et d’autres pays européens à la fin des années 1850. Découvrant la modernité occidentale, le Japon connait alors une période de bouleversements au cours de laquelle le pays abandonne progressivement ses traditions et son système féodal pour devenir l’une des nations les plus évoluées de l’époque. Cette transition, de l’ère Edo (1603-1868) à l’ère Meiji (1868-1912), s’accompagne d’intenses échanges commerciaux avec l’Europe. Bibelots japonais et estampes de l’école ukiyo-e, symboles d’une époque désormais révolue, sont ainsi envoyés de l’autre côté du monde pour le plus grand plaisir des collectionneurs européens.

En 1862, année de la première participation du Japon à l’Exposition universelle de Londres, la première boutique de curiosités japonaises est ouverte à Paris. Cinq ans plus tard, en 1867, l’archipel nippon conquiert le cœur des Français lors de l’Exposition universelle de Paris, un succès qui sera confirmé par celle de 1878. Entre-temps, marchands et voyageurs permettent la constitution des premières collections japonaises par leurs actions et leurs publications. De la mission du baron de Chassiron en 1861 aux figures incontournables de Tadamasa Hayashi et Siegfried Bing (qui contribue à la promotion de l’art japonais par sa revue Le Japon Artistique), en passant par les autres marchand·e·s parisien·ne·s, les expéditions en Asie d’Émile Guimet et d’Henri Cernuschi ou les diverses expositions japonaises au sein de galeries d’art, la capitale française devient le premier foyer japonisant d’Europe au début des années 1880.

"Le soir Paris redevient charmant, mystérieux & amoureux, les femmes passent comme dans les décors japonais les mains pleines de fleurs, les robes à l’empire serrées aux hanches ; & les yeux bordés de Pencil indien semblent encore plus étranges dans la demi obscurité des squares." 
Lettre de Félicien Rops à Ernest Scaron, Paris, non datée. www.ropslettres.be, n° éd. 1164. 

En près de 20 ans, la vague du japonisme – selon le terme inventé par Philippe Burty en 1872 – s’abat ainsi sur la France et ses voisins. Loin d’inspirer uniquement les écrivains-collectionneurs les plus renommés – les frères Goncourt notamment –, les arts du Japon attisent également la curiosité des artistes modernes de l’époque. Fascinés par la philosophie de l’école ukiyo-e, les couleurs vives, les compositions inhabituelles et l’iconographie exotique des estampes japonaises, nombre de peintres, dessinateurs et graveurs, en quête de renouveau artistique, trouvent de nouveaux modèles et des pistes de réflexion pour leur art dans l’œuvre de Katsushika Hokusai, Utagawa Hiroshige et Kitagawa Utamaro pour ne citer que les plus influents.

À l’instar de ses confrères, Félicien Rops n’a pas échappé à l’influence japonaise. Bien au contraire … installé définitivement à Paris dès 1874, ville qu’il fréquentait régulièrement depuis les années 1860, l’artiste namurois a côtoyé les milieux japonisants pendant une grande partie de sa carrière. Élève de Félix Bracquemond, à qui l’on attribue la découverte de la Hokusai Manga chez l’imprimeur Auguste Delâtre, il n’hésitera pas reproduire tel quel, puis à assimiler, plusieurs motifs de ces célèbres carnets de croquis japonais dans des œuvres telles que La Lettre japonaise, Cigogne japonaise ou Lézard japonais. Rops compte également parmi ses connaissances de grands collectionneurs japonais et visite parfois même leurs collections : les frères Goncourt, Henri Cernuschi, Félix Régamey (parti en Asie avec b), … Il fréquente et commente aussi le pavillon japonais de l’Exposition universelle de 1878.

"L’Exposition est finie, & ces derniers jours sont bien bizarres, & les non moins curieux de la saison. – Les Japonais & les Chinois verts de froid, pataugent dans la boue & emballent leurs pivoines qui vont refleurir en mai à Yeddo."
Lettre de Félicien Rops à Léon Dommartin (?), Paris, 15 novembre 1878. www.ropslettres.be, n° éd. 2685. 

Et il développe, au fil des années ce qui semble être une passion pour les arts du Japon, partagée par ses amis, son fils Paul et sa fille Claire.

"Tu ne sais peut être pas Cher Paul ce que c’est qu’un Orientaliste ? Un Orientaliste est un homme qui s’occupe tout spécialement, d’Art de Science ou de littérature orientals. Le Japon & la Chine font partie de l’extrême Orient. Ainsi quand nous tâchons de nous faire une collection de productions Japonaises nous sommes des Orientalistes sans le savoir, – de petits Orientalistes par exemple, car il y en a de terriblement grands ! – Ainsi demain nous allons voir la collection de Mr Cernuschi. […] – Aidé d’un certain Mr Duray ou Duret, un ami de Mr Malassis qui m’a présenté hier à lui, ils ont avec beaucoup d’intrépidité mais aussi beaucoup d’argent enlevé tout ce qu’ils pouvaient trouver de bronzes anciens ; […] – Et des peintures Japonaises merveilleuses ! J’ai eu déjà un avant-gout de cette exposition, ce Mr Duret m’a montré un album de dessins coupés qui est une collection de dessins de toutes les époques faite par un peintre japonais pour son usage personnel. Nous sommes restés stupéfaits d’admiration. Cet album ne sera pas exposé. Les propriétaires ont peur qu’on ne l’abîme en le feuilletant ; mais je suis très heureux d’avoir pu le voir."
Lettre de Félicien Rops à Paul Rops, Paris, 9 septembre 1873. www.ropslettres.be, n° éd. 3318. 

L’abondante correspondance de l’artiste atteste de cet intérêt pour le pays du soleil levant. Il rêve de Japon … et en même temps, s’en défend. Aux côtés de ses lettres illustrées aux motifs japonisants ou faussement envoyées depuis Yeddo (graphie occidentale d’Edo, ancien nom de la ville de Tokyo), Rops s’adonne, critique et conspue ce qu’il appelle des « japoniaiseries », un mot-valise combinant « Japon » et « niaiseries » inventé par l’une de ses connaissances, l’écrivain Champfleury.  

"Ces Japoniaiseries ? C’est un nouveau genre de ‘missives’ inventé par moi à l’instar de Yeddo. Pour égayer la Vie et embêter les têtes en œuf d’autruche de l’Institut."
Lettre de Félicien Rops à Léon Dommartin, s.l., non datée. www.ropslettres.be, n° éd. 2105. 

Son rapport aux japon(i)aiseries est tout simplement paradoxal. Succombant lui-même à l’attrait des bibelots japonais qu’il utilise dans ses dessins ou ses peintures, l’artiste – fidèle à lui-même – n’hésite pas à reprocher cette pratique à ses semblables, voire à les parodier.

Il y a plus … de modernité dans un croquis de DeGas que dans tous les tableaux de Stevens. Ces femmes n’appartiennent à aucun monde. […] Il les met dans le même intérieur, le sien ou celui d’un ami, sans songer que l’enveloppe d’une femme c’est elle même. Et il leur flanque un machin Japonais dans les pattes comme ‘portée de modernité’ ! – c’est niais.
Lettre de Félicien Rops à Camille Lemonnier, s.l., 5 août 1880. www.ropslettres.be, n° éd. 2920. 

De l’introduction de motifs japonais à l’assimilation des principes et méthodes de l’art nippon dans sa propre modernité (du point de vue stylistique, technique ou du support utilisé), Rops a progressivement adopté l’esprit ukiyo-e et s’est inspiré, de près ou de loin, des plus grands artistes japonais des 18e et 19e siècles, de Hokusai à Utamaro (le « peintre des courtisanes et maisons vertes [les maisons closes d’Edo] ») et bien d’autres maîtres de l’estampe. Découvrez ci-dessous une partie de ses oeuvres japonisantes ainsi que la collection japonaise de l'artiste et de son fils au château de Thozée ! 

Thomas CLEEREBAUT - Octobre 2025

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